Au milieu des années 2000, la ville de Charleroi en Belgique a été secouée par une série de scandales politico-financiers impliquant principalement des membres du Parti socialiste (PS). Ces affaires, connues sous le nom d' »affaires carolorégiennes », ont eu un impact considérable sur la politique locale et nationale.
L’affaire de La Carolorégienne
Le scandale a éclaté en 2005 lorsqu’un rapport d’audit a révélé des malversations au sein de La Carolorégienne, une société de logements sociaux de Charleroi. Trois échevins PS – André Liesse, Claude Despiegeleer et Serge Van Bergen – ont été contraints de démissionner suite à ces révélations. Claude Despiegeleer a même été incarcéré pendant plus d’un mois.Cette affaire a eu des répercussions jusqu’au plus haut niveau de la politique belge. Jean-Claude Van Cauwenberghe, ancien bourgmestre de Charleroi et alors ministre-président de la Région wallonne, a dû démissionner de son poste sous la pression médiatique.
L’affaire de l’ICDI
En 2006, de nouvelles malversations ont été découvertes, cette fois au sein de l’ICDI, l’intercommunale de traitement des déchets de la région de Charleroi. Lucien Cariat, un échevin PS, a été inculpé et incarcéré préventivement dans cette affaire.
L’affaire du Foyer marcinellois
Parallèlement à l’affaire de l’ICDI, des irrégularités ont également été constatées dans la gestion du Foyer marcinellois, une autre société de logement social.
L’arrestation du bourgmestre
Le scandale a atteint son paroxysme en octobre 2006 avec l’arrestation du bourgmestre de Charleroi, Jacques Van Gompel (PS). Il a été inculpé de faux, usage de faux et détournement par fonctionnaire public dans le cadre de l’affaire de La Carolorégienne.
Impact et conséquences
Ces affaires ont profondément ébranlé le PS, qui dominait la politique locale à Charleroi depuis des décennies. Elio Di Rupo, alors président du parti, a même attribué la défaite du PS aux élections législatives de 2007 à ces scandales.Malgré ces turbulences, le PS a réussi à maintenir son emprise sur Charleroi. Paul Magnette, devenu bourgmestre en 2012, a joué un rôle crucial dans la reconstruction de l’image du parti dans la ville.
Les affaires de Charleroi ont mis en lumière des problèmes systémiques de gouvernance et de contrôle au sein des institutions publiques locales. Elles ont également souligné les dangers d’une domination politique prolongée d’un seul parti. Bien que le PS ait réussi à surmonter cette crise, ces scandales ont laissé une marque indélébile sur la politique belge et ont contribué à une perte de confiance du public envers la classe politique.
Le 5 septembre 2005, Olivier Chastel présente à la presse le rapport de la Société Wallonne du Logement concernant la situation au sein de La Carolo, la plus grande société de logements sociaux de Charleroi, gérant environ 3 000 logements. Les révélations qui s’ensuivent mettent au jour des pratiques troublantes. La tension monte, à tel point que, le 15 septembre, les responsables de La Carolo organisent une conférence de presse.
Claude Despiegeleer, en référence à un titre moqueur paru dans la presse, déclare alors : « C’est nous les Dalton ». Avec ses collègues André Liesse, Serge Van Bergen, tous échevins de la Ville, et Francis Poty, ancien sénateur PS, ils clament tous leur innocence. « Les fonctionnaires de la Société Wallonne du Logement ont mal interprété nos chiffres, il y a de la jalousie chez certains », affirme Despiegeleer.
Les Révélations Choc
Le 16 septembre, sur l’antenne de Vivacité Charleroi, le rapport initial de 2001 est dévoilé, et c’est la stupeur : 18 000 euros de notes de restaurant, 10 000 euros pour des achats de vins, et 2 500 euros dépensés en fleurs pour Claude Despiegeleer. Face à ces dépenses jugées inadmissibles, Despiegeleer, Van Bergen et Liesse démissionnent de leur mandat à La Carolo le lendemain. Cependant, Jacques Van Gompel, le bourgmestre de Charleroi, estime qu’ils n’ont pas à démissionner de leurs postes d’échevins, déclarant : « Il n’y a pas d’accusations dans la gestion de la ville, il faut faire la part des choses. »
Elio Di Rupo, président du PS, exige pourtant leur démission, une demande que les trois hommes refusent. André Liesse réplique : « Non, je ne veux pas démissionner, car je ne me sens coupable de rien. » Quant à Despiegeleer, il affiche sa popularité en se rendant à la Ruche Verrière, bastion socialiste, où il est ovationné par les militants.
L’Entrée en Scène de Van Cauwenberghe
Le 22 septembre 2005, Jean-Claude Van Cauwenberghe, leader du PS à Charleroi, intervient lors d’un conseil communal chargé d’émotion. Il demande aux trois hommes de rendre un « dernier service » en démissionnant. La pression médiatique s’intensifie, suivie par l’intervention de la justice. Le 15 septembre, des perquisitions sont menées au siège de La Carolo. Le Procureur du Roi, Christian de Valkeneer, confirme l’ouverture d’une information judiciaire.
Le 30 septembre, l’affaire prend un tournant dramatique : Claude Despiegeleer est arrêté et inculpé pour faux, usage de faux, et détournements par fonctionnaire public. Dans le même temps, Jean-Claude Van Cauwenberghe démissionne de son poste de Ministre-Président de la Région Wallonne, invoquant sa « responsabilité morale et politique ».
Les Révélations s’Enchaînent
Les semaines qui suivent voient émerger de nouvelles révélations. On apprend que le personnel de La Carolo était contraint de travailler en dehors de ses heures de service pour divers mandataires communaux. « On n’avait pas le choix. Si on discutait, c’était le licenciement assuré, » témoigne l’un d’eux. Travaux de peinture, réparations diverses, et même installation de l’éclairage de Noël en ville : la liste des tâches imposées est longue.
Face à cette accumulation, Elio Di Rupo prend la parole lors d’un congrès du PS à Nivelles, le 5 octobre 2005. « Je ne veux plus de parvenus. Je les traquerai moi-même, » clame-t-il, exprimant son ras-le-bol devant ces pratiques.
Un Scandale de Grande Ampleur
Le scandale ne se limite pas à La Carolo : il s’étend à presque tous les domaines de gestion de la ville. Douze jours après les élections communales de 2006, c’est au tour du bourgmestre Jacques Van Gompel d’être arrêté pour le « Dossier Ville », les faux procès-verbaux du collège communal, et des marchés publics frauduleux. Arrêté le matin en tant que témoin, il ressortira le soir menottes aux poignets.
Les inculpations continuent. Le 19 mai 2006, Lucien Cariat, président de l’ICDI, est à son tour arrêté pour sa mauvaise gestion de l’intercommunale. Au total, une centaine d’inculpations seront prononcées et pas moins de soixante-dix instructions seront ouvertes au Parquet de Charleroi. Le grand déballage se poursuivra pendant des mois, touchant tous les domaines, des sports à l’enseignement, en passant par les marchés publics et les parkings.
Le dernier grand procès de cette période, le « Procès Ville », est prévu pour démarrer en novembre prochain, avec quatre semaines d’audiences attendues.
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